"J'avais acheté les
Secrets de la mer Rouge et les Aventures de mer, de Monfreid,
à Addis-Abeba, et je venais juste d'en terminer le lecture. J'avais
été fasciné par ce récit d'une vie sauvage et sans loi. Monfreid
était venu à Djibouti en 1910 pour occuper un emploi dans une
société commerciale. Il n'avait pas tardé à se rendre compte qu'il
n'y avait rien de commun avec la mentalité petite-bourgeoise de ses
collègues français. Les Danakil, en revanche, avaient séduit sa
nature romantique, il apprit leur langue et passa tout son temps libre
en leur compagnie. Cela ne manqua pas de scandaliser la communauté
française : le gouverneur le convoqua et le réprimanda vertement.
Monfreid ne fit aucun cas de ses remontrances. Très vite il abandonna
son emploi et devint musulman... pour ainsi dire un Danakil. Il s'acheta
un dhow, recruta un équipage et s'en fut pêcher les perles au
large des îles Farsan et vendre des fusils de contrebande en Abyssinie,
via Tadjoura, provoquant ainsi la fureur des trafiquants
français établis là depuis longtemps et qui faisaient ce commerce
plus ou moins officiellement. Lorsque son dhow fit naufrage, il
se hâta de s'en construire un autre, qu'il baptisa Altaïr."
Wilfred Thesiger, La vie que j'ai choisie.
TADJOURA

D'après
Henry de Monfreid "J'étais jeune, très
sensible, éperdument romantique, et Tadjoura était l'endroit idéal pour
clore mon voyage. La ville s'inscrivait parfaitement à mes yeux dans cet
univers oriental authentique dont Conrad parlait dans ses livres, un monde
lointain, superbe, inexploré. La plage frangée de palmiers et la mer
étincelante, d'un vert émeraude, le pourtour obscure des montagnes
enserrant la baie, les dhows ancrés au large, les canots faisant
la navette. Des mosquées blanches parmi les palmiers, des ruelles
étroites entre les logis étriqués aux toits de nattes."
Thesiger,
La
vie que j'ai choisie. |